lundi 16 novembre 2009

Marchés de l'information

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L'information généraliste sur le papier se porte mal et ne se vend pas sur Internet. Pour l'instant, cette proposition générale est indéniable. Qu'est-ce qui est en question, l'information ou le papier, ou les deux ? La meilleure réponse semble être l'information payante. En effet, la presse gratuite se vend aux annonceurs qui achètent de la lecture gratuite dans les transports ; la radio se vend aux annonceurs qui achètent de l'écoute gratuite dans la voiture, et la télévision se vend aux annonceurs qui achètent de l'écoute gratuite au foyer. L'information dure, sérieuse, politique et économique, constitue une part mineure de tous ces contenus.

Introduire une nouvelle variable dans l'analyse peut aider à discriminer entre les variables explicatives. Voyons ce qu'il en est sur les chaînes d'information.
L'audience de CNN aux Etats-Unis est en baisse cette année sans élection. L'élection présidentielle est un événement qui génère de l'information politique et des débats économiques mais aussi beaucoup d'info people et de publicité politique (payante). Pour la population active (25-54 ans), CNN (202 000 téléspectateurs) est passé derrière Fox News (qui ne compte toutefois que 689 000 téléspectateurs), derrière CNBC et même HL (Headline News, version résumée de CNN). Pour résister à son déclin, CNN développe une stratégie multi-plateforme (Internet, mobilité), éditoriale et publicitaire : CNN en quelques minutes sur Internet, à la demande mais sans les revenus des opérateurs câble et satellites.
Quels signes cliniques retenir de cette symptomatolgie ?
  1. L'info se consomme de plus en plus rapidement et à la demande.
  1. La dramatisation de l'info ne fait plus recette. Copiée sur la théâtralisation des infos nationales du soir ("Evening News") lancée dès la fin des années 1940 (le 20 heures en France), elle ne répond plus aux modes de consommation de l'info par un grand public suralimenté en infos.
  1. Le cycle de l'info est discontinu. Créer des événements artificiels ne suffit plus pour attirer les chalands pendant les périodes vides. Le consommateur d'information a appris à consommer l'information et ne prend plus l'anniversaire d'un événement pour un événement. Le marronnier ne paie plus. Quant à peopliser l'information, stratégie de Fox News (personality-driven), on finit par n'avoir plus d'info mais de l'opinion par du people. Les doxosophes règnent. 
  1. La mesure de l'audience de ces médias est insuffisante. Peu opérationnelle, mal adaptée à la longue traîne des petites audiences, elle est incapable de gérer rigoureusement l'approche multiplateforme dont se réclament les médias tels que CNN (plus puissant que Fox News sur le Web). Les annonceurs apprennent chaque jour à mieux discuter l'audience, le ciblage comportemental, les mots clés et à gérer leur pression publicitaire avec toutes sortes d'analytiques "user centric", loin de tout panel. La mesure de la concurrence commence par la concurrence entre les mesures de ces médias d'info.
Pour comprendre les problèmes que connaissent la presse d'information et les chaînes d'information, il semble que l'on sous-estime deux variables : la forme et le format de l'information d'une part, la mesure de l'audience, d'autre part. Internet a bouleversé ces deux aspects de manière irréversible.
La première victime de ces tendances est l'info sur les chaînes spécialisées et dans la presse, viendront sans doute ensuite l'info sur les chaînes généralistes puis sur les stations locales généralistes.
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