mardi 29 juin 2010

Comment échapper à l'actualité ?

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L'épisode 14 de la saison 2 de la sitcom américaine "How I Met Your Mother" (CBS aux Etats-Unis, en France sur Canal Plus et NT1, et bien sûr en DVD) pose un problème inattendu, paradoxal : comment échapper à une information, comment l'éviter ? Comment ne pas savoir ? Médiaplanning du refus, VOD en négatif. La question n'est plus "comment être informé ?" mais "comment ne pas être informé ?".

Les cinq héros de la série ont pour habitude de regarder ensemble, chaque année, la retransmission télévisée du Super Bowl, et d'en faire une fête. Cette année, en revanche, bloqués par un enterrement, ils ne peuvent voir le match en direct, aussi, se donnent-ils rendez-vous le lendemain soir pour le regarder ensemble en différé (d'où le titre de l'épisode, "Monday Night Football" .
Après une prière à TiVo pour que l'enregistrement se passe bien, ils se promettent de tout faire pour ne pas connaître le résultat avant le lundi soir, lendemain du match. Les solutions et stratagèmes employés par nos cinq héros sont plus ou moins ridicules (c'est une sitcom  parfois un peu bâclée) mais ils illustrent néanmoins de manière convaincante la difficulté de ne pas savoir. Nul n'est plus censé ignorer "l'actualité" inscrite à notre agenda par les médias (agenda setting). Comment, par exemple, "actuellement", ignorer la spectaculaire déroute de l'équipe française de football ? Le droit d'ignorer n'est pas garanti. L'agenda n'est plus seulement ce qu'il faut faire (agere) mais aussi ce dont il faut parler, sur quoi il faut opiner : les ordres du jour.
  • Le bombardement informatif et sa propagation sont tels qu'échapper à l'actualité est impossible.
  • Comment, dans cette situation d'abondance et de pression communicationnelle, les médias d'information grand public pourraient-ils espérer faire payer l'information d'actualité ?
  • Comment, dans un tel environnement, produire des énoncés scientifiques, créatifs, indépendants, qui ne soient pas corrompus par l'air du temps, l'opinion ?
  • Tenir des "considérations in-actuelles" demeure indispensable.

dimanche 27 juin 2010

Journalisme de la richesse ?

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Vendu à News Corp., le Wall Street Journal perdra-t-il son indépendance ? Le quotidien de la finance et de l'économie américaines semble vouloir aller au people, et donner la parole aux puissances économiques en place (the powers that be!). Péché mortel du journalisme : fréquenter les pouvoirs au lieu d'établir des contre-pouvoirs.
Chaque vendredi matin, le site diffuse désormais la vidéo (VOD) d'une interview de patrons d'institutions, d'entreprises : "The Big Interview", allusion ironique - sans doute involontaire - au roman de John Dos Passos, The Big Money. Premiers interviewés : la Présidente du FDIC, puis le "White House Chief of staff"... Don et contre-don ? La presse comme contre-pouvoir ?

Pour les "small" interviews des familles endettées, le chômage, la maladie, pour le journalisme de la misère, il y le talk show d'Oprah (et bientôt sa chaîne). "All right we are two nations", reconnaissait déjà Dos Passos, en 1936, dans "The Big Money".

Notes
  • L'inflexion de la stratégie du Wall Street Journal pourrait être de s'ouvrir à des éléments rédactionnels moins spécialisés (sport, etc.) et d'attaquer le territoire du New York Times en fin de semaine avec une section "New York".
  • Se diversifier en affinité avec son lectorat : voyages (WSJ Travel), vins et spiritueux (Wine Merchants). 

dimanche 20 juin 2010

La TV américaine et son marché publicitaire

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Aux Etats-Unis, les ventes de l'espace à l'avance pour l'année TV 2010-2011 (upfront market) sont presque achevées (quelques chaînes cabsat et des networks hispanophones sont encore en négociation). Tout va bien : 18 milliards de dollars d'espace sont attribués par les annonceurs au prime-time TV.
Les annonceurs des secteurs sinistrés en 2009 sont revenus en TV : automobile, grande distribution, services financiers. Le cinéma et les télécoms continuent d'investir massivement la télévision.
Les networks ont augmenté leurs prix de 8 à 10% (CPM), les chaînes thématiques de 5 à 10%. Certes, les ventes n'ont pas rattrapé les niveaux de 2008 ou 2007, mais, comme les chaînes thématiques accroissent leur part de marché, les transferts des networks généralistes vers les chaînes thématiques sont indolores pour les grands groupes multi-plateforme : leur part de marché (généralistes plus thématiques) est constante.

L'interprétation de ces premières données doit être prudente : l'upfront market est suivi d'un scatter market trimestriel dont on ne saura rien avant plusieurs mois. On dit : "hot upfront, cool scatter"... L'an passé (cool upfront), la hausse des prix du scatter market par rapport à l'upfront atteignit parfois 30%. De plus, les "networks" vendent upfront les trois quarts de leur inventaire, les thématiques deux tiers.

Après l'alerte de 2009, la télévision classique apparaît sauvée. Mais de quoi parle-t-on ?
De publicité ? Oui, le média télévision reste indispensable aux annonceurs des grandes marques.
De l'audience ? C'est une autre histoire. L'audience des networks généralistes nationaux (ABC, CBS, NBC, Fox, CW) s'érode ; l'audience de nombreuses grandes chaînes thématiques semble également touchée (ESPN, etc.). Pour les autres, le reste, la longue traîne des chaînes spécialisées, dont on ne sait rien, faute de mesure, on peut estimer qu'elle est en hausse. Pour l'instant, ces chaînes difficiles à acheter, sauf pour leurs annonceurs captifs, ne risquent pas de menacer les grandes chaînes mesurées (il n'y a pas d'adnetworks en télévision). Leur économie est liée à la vente en bouquets (bundling) dont le modèle est fragile et le principe de moins en moins populaire (cord-cutting).

Le marché télévisuel américain, en ce moment faste, manifeste deux problèmes qui sautent aux yeux lorsque l'on confronte au  marché publicitaire télévision le marché publicitaire Internet.
  1. La mécanique du marché TV semble rudimentaire comparée aux places de marché programmatiques que met en place Internet (Demand-Side PlatformsReal Time Bidding, creative optimization, Ad Exchange, Adserving, etc.). La télévision est loin d'un marché efficient !
  2. La mesure d'audience TV est limitée, comparée à ce que pratique Internet où se développent la mesure du Coût Par Action, l'évaluation stricte de l'efficacité, le tout fondé sur des pratiques de ciblage vérifiables (ciblage comportemental, reciblage, etc.). Une telle organisation de marché peut-elle perdurer alors que la télévision est en voie de numérisation, que des données rigoureuses dorment, inexploitées, dans les set-top boxes (return path data) ? 
Une analogie subsiste néanmoins entre ces deux marchés américains, le rôle des panels de mesure, qui confèrent un privilège étonnant à certains supports qui peuvent se targuer d'une "puissance" pas toujours bien acquise.
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FIFA autopromotion

Auto-promo durant le match Cameroun - Danemark. Photo CmM
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Avons-nous mérité de supporter les inclusions de la FIFA en plein milieu des matchs, avec une répétition pénible ? Cette auto-promotion que l'on ne peut pas désactiver se moque des téléspectateurs et des chaînes qui ont acheté bien cher les droits de retransmission.
Pourquoi une telle auto-promotion de la FIFA  (Fédération Internationale de Football Association) ? A-t-elle besoin de notoriété ? A quelle fin ?

Personne ne semble avoir réagi à cette intrusion répétée que l'on ne tolérerait d'aucun annonceur, d'aucune chaîne commerciale. Bizarre ? Que disent les institutions chargées de vérifier la réglementation (CSA, ARPP, etc.) ?
Qui peut-nous éclairer ?
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mercredi 16 juin 2010

L'obsesssion du papier

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Le papier, quand même !

Mise à jour 12 mars 2012

Ils ont beau ne jurer que par le numérique, vouer leur âme aux iPad ou à Twitter, prédire soir et matin la fin du papier... dès qu'ils en ont l'occasion, ils en viennent au papier. A son tour, Rue89.com propose un magazine papier (3,9 €, 100 pages) ; trois ans après son lancement sur Internet, le site est décliné en version mensuelle et distribué par le réseau Presstalis (ex. NMPP) depuis le 16 juin (87 000 exemplaires).
Comment l'originalité du site (les trois types de journalisme, "l'info à trois voix"), s'adapte-t-elle à un support traditionnel ?
Diversification ? Optimisation par un modèle économique mixte ? Que recherchent les éditeurs qui redécouvrent le papier ? Bénéficier de notoriété grâce aux trente mille points de vente du réseau presse ?

En mars 2012, Rue 89 revient au tout numérique : après le passage au papier (reverse publishing), le mensuel passe aux tablettes numériques. Nouvelle étape de sa vie, nouvelle innovation, nouveau test ?
Le mensuel papier se serait vendu en moyenne à 19 000 exemplaires (2009). La version iPad est deux fois moins chère que la version papier (1,99€ au lieu de 3,9)

La tentation du papier se traduit parfois par un retour inattendu aux livres. Ainsi, le site des "Coupons Mom's", consacré principalement aux coupons de réduction pour les achats d'épicerie, publie un livre de conseils : comment diviser la facture d'épicerie par deux.


Il faut penser la relation papier / numérique hors du manichéisme courant. Voilà qui n'est plus si simple. D'abord, garder à l'esprit que la transition d'un modèle à l'autre est lente et contournée. Il est indispensable d'admettre que l'on doit expérimenter.
Puis prendre en compte des comportements qui échappent au calcul économique direct et immédiat, à la rationalité gestionnaire et technologique pour emprunter à l'économie, d'apparence irrationnelle, de la légitimité sociale, à l'accumulation d'autres formes de capital.
L'entreprise Internet reste-t-elle associée à une sorte de déclassement, à un déficit de légitimité ? Les travaux de sociologie de la culture manquent dans ce domaine. Le papier comme retour du refoulé ? "Ne dites pas à ma mère que je travaille dans [Internet], elle me croit... " A vous de compléter et adapter au goût numérique du jour le titre de Jacques Séguéla...
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lundi 14 juin 2010

Coupe du monde de foot : Univision écrase ESPN

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Le Mexique et l'Afrique du Sud ont fait match nul. Sur le terrain de l'audience, aux Etats-Unis, le network hispanophone Univision (télévision gratuite) l'a emporté sans discussion avec 5,4 millions de téléspectateurs (Nielsen live + same day) sur ESPN, la chaîne payante du câble (2,6 millions de téléspectateurs).
Le score est sans surprise : la majeure partie de l'audience habituelle de Univision est de culture mexicaine.
Loin derrière le match d'ouverture, le match France - Uruguay a rassemblé deux fois moins de téléspectateurs (2,54 millions) sur Univision. Globalement, le network double son audience par rapport à 2006 (même décalage horaire, 6 heures au moins).

Univision, "La Pasion del Mundial"
  • Applis "Univision Futbol" pour iPhone, et bientôt pour android, Blackberry et iPad
  • Exploitation intensive de la Coupe du monde avec une campagne promotionnelle plurimédia : presse, cinéma, affichage (bus, métro, grand format), Internet mobile et fixe, radio.
ESPN investit beaucoup pour cette Coupe du monde
  • La couverture - 65 heures de direct - mobilise 300 personnes, y compris des commentateurs anglais (N.B. 9 des 23 joueurs de la sélection américaine jouaient en Grande-Bretagne durant la saison passée). 
  • Les matchs diffusés en direct sur ESPN sont rediffusés en différé sur ESPN Classic.
  • Appli iPhone : ESPN 2010 FIFA World Cup
ESPN tente d'amener les Américains au soccer, de les convertir. Au contraire, Univision s'appuie sur une culture footballistique déjà acquise. Les écarts d'audience observés, toutes choses égales par ailleurs, témoignent de la force de la culture dans les comportements télévisuels.
ABC (groupe Disney, comme ESPN), network généraliste gratuit, anglophone, joue sur la fibre plus chauvine et nationale et rediffuse les matchs de l'équipe américaine (13 millions de téléspectateurs pour le match Etats-Unis / Grande-Bretagne). Ce qui reste inférieur au score de la finale féminine Etats-Unis / Chine en 1999 (18 millions).
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vendredi 11 juin 2010

Accréditation Quantcast

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Le Media Rating Council  (MRC), équivalent américain du CESP, a publié l'audit de Quantcast. En revanche, Nielsen Net Rating (audit lancé en 2007) et comScore Media Metrix sont toujours en cours d'audit par le MRC (depuis mai 2007).
Quantcast dont l'audit a commencé en juin 2008 est donc le premier service de mesure d'audience Internet à se voir accrédité aux Etats-Unis, pour une partie de son offre, du moins. En fait, Quantcast n'a été accrédité que pour la partie de la mesure qui recourt, pour chaque site mesuré, à des tags ("measurement tags") et pas (encore ?) pour les modélisations et fusions diverses (estimation des aspects socio-démographiques, etc.). Une telle distinction, entre ce qui est audité et ce qui ne l'est pas, ne facilite pas la clarté de la situation : beaucoup de lecteurs pressés auront retenu que Quantcast a été accrédité et ne se seront pas souciés de tels distinguo. Ceci ne retire rien au "coup" que repésente cette accréditation, tant pour Quantcast que pour le MRC.

Quantcast, lancé en 2006, est depuis quelque temps déjà visible en matière de mesure d'audience, surtout aux Etats-Unis. Cisco est un de ses actionnaires significatif. Quantcast a levé 53 millions de dollars en trois tours menés par Cisco.
Quantcast réunit déjà un portefeuille de clients dans la télévision : CBS, Belo, Fox, NBC, Hulu, ABC, etc. Qantcast collabore également avec TiVo pour la mesure.

Deux remarques à propos d'audit et d'accréditation :
  • un audit "lourd", piloté par le MRC, semble durer au moins deux ans.
  • le MRC audite d'autres services et outils que ceux de mesure d'audience au sens strict, entre autres les outils d'adserving : Atlas, Disney, EyeBlaster, Doubleclick (DFP et DFA), MSN, Yahoo Right Media, etc. ont fait l'objet d'audits. Connexus fait auditer sa place de marché (traffic marketplace), Google AdWords a été audité...

  • Alors que, dans tous les médias, se multiplient mesures et méthodologies de mesure, les audits sont de plus en plus indispensables aux utilisateurs. Ces audits seront de plus en plus complexes, et lourds. Or il doivent être rapides pour être utiles...

jeudi 10 juin 2010

Pas d'aides à la presse aux Etats-Unis

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Rasmussen Reports, un site qui publie les sondages produits par Pulse Opinion Research, donne les résultats d'une enquête par téléphone sur le financement de la presse aux Etats-Unis (1 000 personnes interrogées début juin, sondage automatique).
Les recommandations de la Federal Trade Commission (FTC) pour aider la presse en difficulté et "réinventer le journalisme" sont refusées par plus de 70% des personnes interrogées. Ni taxe sur la téléphonie (refusée par 84%), ni sur les équipements électroniques (76%), ni sur les sites agrégateurs de news tels Google News ou Yahoo News (74%). De la même façon, 71% des personnes interrogées refusent l'idée d'une aide publique à la presse, alimentée par l'impôt.

58% des personnes interrogées estiment que les sites Internet compenseront de toute façon, d'une manière ou d'une autre, les insuffisances éventuelles de la presse papier.

Pour les Américains, la presse et les médias en général ne relèvent pas de l'action gouvernementale, ce sont des produits comme les autres : à la presse de trouver des clients qui veulent payer et des annonceurs, on ou off-line, à elle de réformer son métier. Dont acte.
Et l'automobile ?
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mercredi 9 juin 2010

Local, local, local

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En France, il fait sourire avec condescendance, ce slogan des afficheurs américains, repris là-bas par tous les médias, de la PQR à la TV ("location, location, location"). On objecte ici, l'air malin, que les Etats-Unis sont plus vastes que la France et que ce slogan ne vaut rien dans notre petit hexagone. Erreur : la vie quotidienne est locale, où que l'on vive.

Lancé en avril 2006, le site de Petites Annonces gratuites du Bon Coin vient au secours, s'il en était besoin, de l'affirmation du local. En nombre de Pages Vues, leboncoin.fr, c'est plus que Skyrock.com, equipe.fr, Pagesjaunes.fr, Caisse-epargne.fr, seloger.com, lemonde.fr, lachainemeteo.fr, le figaro.fr et Tele-loisirs.fr ...c'est à dire plus que ses neuf suivants dans le classement que l'OJD publie (mois de mai). 32 pages vues par visite, soit trois fois plus que la plupart des sites de Petites Annonces, qui eux même dominent la plupart des sites sous ce rapport.
Ajoutez à cela que l'internaute qui place une petite annonce ou consulte le site pour trouver quelque chose est, par nécessité, "engagé", impliqué et attentif. Et puis, des clients et des utilisateurs partout, cela construit de belles audiences régionales et, bien sûr, une belle audience nationale. Les annonceurs locaux et nationaux ne vont pas manquer de s'y intéresser de plus en plus. De plus, l'internationalisation est doute possible : déjà le site Blocket (site suédois de petites annonces du même groupe, à l'origine du modèle) mentionne dans son bandeau inférieur les équivalents étrangers, dont le Bon Coin pour la France (Blocket utomland: Frankike)...
Pour paraphraser le slogan du boncoin : la bonne affaire média aujourd'hui, est peut-être au coin de la rue. Ce qu'ont compris, sans le claironner, les deux groupes actionnaires du Bon Coin : Schibsted et Ouest-France (via Spir), comme 20 Minutes
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mardi 8 juin 2010

La nouvelle expérience télévisuelle

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Les étudiants du Master 226 de l'université Paris Dauphine organisent un colloque sur "la nouvelle expérience télévisuelle". En sortant de cours, les conversations allaient bon train et certains étudiants m'ont mis au défi de traiter le sujet par la négative. Défi relevé, en cette période d'examen, à la manière des dissertations classiques, en trois parties.

Première partie. Où l'on acccorde à cette question quelques concessions positives. D'abord, il y a davantage de chaînes pour la plupart des foyers. Ensuite, les écrans des téléviseurs sont plus agréables, les images plus belles. Et il y a plusieurs appareils au domicile.


Deuxième partie. Où l'on évoque l'expérience concrète, courante du téléspectateur.
D'abord, il lui est difficile de trouver et sélectionner un programme. La presse de télévision est de moins en moins adaptée. La télécommande ? A raison d'une par appareil (set-top box, manétoscope, lecteur enregistreur DVD, téléviseur, etc.), embouteillage assuré sur la table basse, où, de toute façon manque celle dont on a besoin. Navigation laborieuse. Un bug ? On débranche tout, on rebranche, et l'on attend que tout se réinitialise. La nostalgie de Windows 95 nous étreint. Et soyons charitable, ne parlons pas des modes d'emploi des appareils : ils ne sont pas conçus pour être lus.
Quand il s'agit de naviguer, de rechercher et trouver quelque chose, aller d'Internet à la télé est une expérience déprimante, insupportable : Google, Apple, par pitié, aidez les !


Troisième partie. Où l'on explore, en synthèse, la liberté du téléspectateur (note du claviste : la liberté, c'est toujours pratique en troisième partie !).
L'offre élargie de télévision s'achète en bouquet. Le marketing des opérateurs est en retard de plus d'un siècle sur celui du fleuriste qui laisse ses clients composer leur bouquet librement, fleur à fleur. En télé, des allumés du marketing ont concocté des bouquets insensés. Car eux savent mieux que le consommateur. Ils choisissent à sa place, de peur qu'il ne choisisse pas les bonnes chaînes, le plus de chaînes possibles, et que certaines chaînes, du fait de l'insupportable liberté du téléspectateur, se trouvent privées d'audience. Le bouquet, vous dis-je ! Alors que le marketing des produits numériques ne parle que personnalisation, souhaite que "cent fleurs s'épanouissent", l'opérateur de télévision impose ses bouquets, SA télé.
Parlons VOD. Formidable, mais l'offre est restreinte et la longue traîne est à la traîne. Mais nous voici à nouveau à la merci de la télécommande. Errer, touche après touche, en haut, en bas, à gauche, OK... et parcourir une arborescence aux catégorisations bizarres. Mauvaise touche ? Trop tard, mais c'est payé. Et l'on recommence tout à zéro ! iTunes, amazon, par pitié, aidez les !


Conclusion. Le téléspectateur est né libre et partout il est dans les fers des chaînes et des grilles... des ergonomies lourdes et d'un marketing condescendant. Et, pour couronner cette expérience, en plus de la facture de l'opérateur, tombe en automne celle de la redevance. Expérience annuelle, en rien nouvelle. L'habitus télévisuel n'a pas évolué depuis la télécommande et le magazine TV : il reste prisonnier de gestes analogiques. 

Bon, la dissertation est un genre à forme fixe, le sujet est imposé.
J'aurais dû faire rêver : rattrapage, VOD, télé connectée, HD, 3D, interactivité, widgets, etc. J'aurais pu parler télécommande iPad, capping publicitaire transféré en télévision, Hulu, Netflix... Certes, mais, ici et maintenant, l'expérience télévisuelle vraiment nouvelle, c'est YouTube et Dailymotion. La "nouvelle expérience télévisuelle", c'est à Internet surtout qu'on la doit. 
Et pour le Grand Soir de la révolution numérique, comptons plutôt sur Google et Apple.
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lundi 7 juin 2010

ZOOM Japon

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Les gratuits dynamisent la presse. Ils allongent la longue traîne de l'offre des titres, couvrant et isolant progressivement la multiplicité des segments correspondant à des pratiques sociales et culturelles.
Considérons que le goût pour le Japon est l'une de ces pratiques (plutôt que de recourir à cette expression ridiculement fausse, et inélégante, de "niche") : mangas, gastronomie, arts, langue, gô, littératures, cinéma, histoire, animes, mode, jeux vidéo, arts martiaux, bonsaï, design, pêche, tatouages, érotisme... A chacun ses goûts du Japon : nous sommes tous, chacun à sa manière, sous l'empire de Roland Barthes. Bientôt, le salon Japan Expo ("le festival des loisirs japonais", qui a acheté la 4 de couv de ZOOM Japon) réunira, début juillet, en un seul espace tout cet exotisme pour quatre jours.

Depuis près de 20 ans, plus d'une cinquantaines de titres se consacrent totalement ou presque au Japon. Sans compter un grand nombre de Hors Série.

ZOOM Japon est un nouveau mensuel (10 numéros) de 20 pages sur papier journal, distribué dans les boutiques et les lieux où, d'une manière ou d'une autre, il est question du Japon (567 points de distribution, restaurants et boutiques spécialisées). Les éditions Ilyfunet publient déjà OVNI  (Journal franco-japonais de Paris, petites annonces, lancé en 1979), un gratuit destiné aux Japonais en France. L'éditeur gère également un centre culturel, Espace Japon, situé à Paris entre la République et la Gare de l'Est. Le premier numéro de ZOOM Japon, qui titre sur "le polar nippon", consacre beaucoup d'articles et de suggestions à différentes dimensions de la culture japonaise. La publicité est toujours pertinente (annonceurs captifs, presque tous... d'ailleurs, les tarifs sont en japonais), en affinité parfaite avec les lectures.

Le site Internet (en flash, donc illisible sur iPad et iPhone) est le miroir fidèle du mensuel (ou l'inverse ?) ; il simule le feuilletage, agréablement (mais comment se débarrasser du bandeau noir "Press Esc to exit full screen mode" qui entrave la lecture ?). Attention : l'iPad, s'il se généralise, risque de démoder rapidement ce mode de présentation...
Il n'y a pas de développement spécifique au support Internet / écran d'ordinateur, seulement des pages que l'on tourne, avec le chemin de fer en bas de page pour s'y retrouver. Dommage, pour les annonceurs comme pour les lecteurs, que les éléments publicitaires ne soient ni zoomables, ni clickables. Paradoxe.

On imagine deux modes de commercialisation de l'espace publicitaire, l'un par la voie papier, l'autre par la voie on line. Quelque chose est à inventer... avec capping, optimisation, etc.
Papier ou Internet, les messages publicitaires sont ici les mêmes, exactement : il est donc possible de combiner, sans difficulté insurmontable, les audiences du papier et celles du site. Selon la manière dont le site est taggé et le web analytique utilisé, la connaissance de l'audience web peut enrichir la connaissance, souvent restreinte, des comportements de lecture de l'édition papier, le web analytique réalisant une sorte de vu-lu très précis et non intrusif.
En conclusion, l'ensemble constitue une belle innovation "presse", qui, comme souvent avec Internet, à peine née, doit déjà être mise à jour. Bêta ?
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