lundi 30 juillet 2012

Musique en lignes




Dialogue

"Joue-moi Syrinx
- J'ai pas la partition
- Et sur le Web ?
- Elle n'y est pas... Ah, si, je dois la télécharger !

...

- Je ne peux pas tourner les pages
J'ai essayé avec le pied, mais ça ne marche pas.
-Il faudrait une appli qui ferait défiler la partition au fur et à mesure que tu joues."

Développeurs mélomanes ?

dimanche 29 juillet 2012

Books in Paris, the French way

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Two major bookstores in Paris simultaneously bought outdoor space (posters) to advertise their services during the month of July.
FNAC is a chain of stores that sells books, mostly best sellers. It also sells CDs, DVDs, video games, phones, TV sets, computers; it is a mix of Best Buy and Barnes & Noble.
Gibert Jeune is another major bookstore, particularly for students in Paris. Located in the Latin Quarter (and in the 13th district), it sells textbooks and scientific books in most of the academic fields (liberal arts, medicine, business, math, physics). It also buys and sells used books.
Both of them compete with Amazon, online and offline, in different ways. Note that none of the ads mention that the stores offer a drive (where you can order a book online and pick it up at a store -"retrait en magasin", cf. Amazon Locker Delivery). Both campaigns highlight two different sets of USPs:
  • Gibert Joseph's USP is that it is a real bookstore where you can actually handle the books ("à portée de main") and skim through the store's enormous inhouse inventory (500,000 books). It is also very close to you (less than 30 minutes, wherever you live once you are in the metro).
  • FNAC's USPs are:
    • it delivers books for free. 
    • it sells an eReader, so you can travel light while on vacation. The price of the Kobo eReader is comparable to the Kindle Touch (amazon).
Both advertising campaigns share a common point in that they are very traditional (posters). It might have been more convincing had they taken advantage of the network of digital screens located throughout the metro (DOOH). Given the main target, something interactive could be effective, for instance using smartphones and apps.

Poster in the metro (on the platform). 500,000 books (get there by metro, bus, taxi... skateboard, etc.)
The closest FNAC store? At home. Fnac.com : Freee delivery for all your books


Books for vacation: "This summer, I travel light: a bikini, a skirt and a thousand books"

jeudi 26 juillet 2012

Le monde selon Apple

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En mettant sur le marché une nouvelle version de son OS Mountain Lion (0S X 10.8), Apple expose en actes sa vision du monde, actuel et à venir. Au-delà des deux centaines de nouvelles fonctionnalités, améliorations, quelles tendances se dégagent ? Nous en isolerons quatre.
  • L'interface vocale. Présence de la voix, première dans l'histoire des médias, déjà présente avec Siri. On peut désormais tout dicter, partout où l'on peut utiliser un clavier. Presque toute la bureautique est concernée.
  • Le "cloud" partout. Avec iCloud, la sauvegarde est continue et la synchronisation entre appareils est constante (ordinateurs, tablettes, smartphones). 
  • Tout est prévu pour l'adaptation et l'intégration au monde sinisé. La relation aux principaux acteurs du web chinois chinois (navigateur, réseaux sociaux, vidéo) : Weibo ( 新浪微博), Baidu (百度), Tudou (土豆网), Youku (优酷网). Enfin, on sort de l'univers alphabétique ou du moins, Apple prend en compte un monde non alphabétique (caractères, pinyin, etc.). Décentrement salvateur dans notre univers tellement occidental et réducteur. 
  • La relation aux réseaux sociaux est intégrée : Facebook, Twitter, Weibo, Vimeo. Ils font désormais partie de la panoplie bureautique de base des internautes.
Dans cette évolution logicielle se perçoit l'affrontement mondial pour la confection et le déploiement des outillages conceptuels et communicationnels formateurs des modes de pensée fondamentaux. Dans ce domaine, l'Europe semble avoir déjà perdu la guerre, même si, parfois, ici ou là, une de ses régions gagne une bataille.

lundi 23 juillet 2012

A Netflix for magazines? What for?

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I read on the Bloomberg Businessweek website that a "Netflix" for magazines could be launched, delivered on iPad. The author, a journalist, Rich Jaroslovsky, describes thoroughly the nuts and bolts of the so-called "Netflix app for iPad", "Next issue".

Why did Netflix succeed? Because it is simple and convenient (mailbox at first, DVD by mail, subscription). But mostly because it proposes a very popular entertainment product with a huge supply: movies and series.
There is no other "cultural product" as popular, as cheap. The product is almost universal: every home owns a DVD player plugged into a TV set. Every home has a mailbox.
Streaming makes it even more convenient for well equipped and video smart homes (connected TV, etc.).

Let's compare succinctly the market for magazines with the Netflix video market. 
  • Most of what you can find in an online magazine you find in another one or in a pure player website, for free. 
  • All news has been already covered by the other media, online (websites, social media) or offline (radio, TV, press). There is no exclusivity, at all. Any scoop lasts about 5 minutes at most. 
  • With the help of a search engine, you can find and gather on your tablet or computer all the news that fits, screened by the languages you can read. 
  • What do we need a "netflix for magazines" for? What is the added value? Its USP?
  • Netflix can count on family audiences, and movie and series addicts; do magazines have such a following?
What will save magazines? Wonderful quality and exclusive content. 

dimanche 22 juillet 2012

Design et simili : skeuomorphisme

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"Find my friend", appli iPhone,
imitation cuir, motif présent dans iCal
Tout élément d'un design doit-il renvoyer à une fonction de communication ?
On appelle "skeuomorphism", en anglais, une qualité, un objet ou une décoration quand son design est superfétatoire, quand il est sans lien aucun avec une fonctionnalité. Sa dénotation est vide, sa connotation sans pertinence. Logique sociale du simili : apparences du cuir, du bois (meubles, poutres), du marbre, de l'ancien... Logique du tuning automobile aussi. Faire riche avec du bon marché.

Selon le dictionnaire Bailly, le mot σκεῦος (skeuos) évoque un outil, un équipement militaire (des hommes, harnachement des chevaux) ; il connote aussi un costume (théâtre), un ornement, une décoration, la mode (qui en fait aujourd'hui grand usage). Le mot "skeuomorphism" suit d'assez près l'étymologie, le concept désignant certains types de design où la forme est sans fondement.

Dans un post intitulé "Where Microsoft has more taste than Apple" (sur le site Cult of Mac), Mike Elgan dénonce cette conception médiocre du design qui peut sévir partout, même chez Apple ! "More taste" est une allusion à un mot de Steve Jobs à propos de Microsoft (cf. Humanisme numérique). L'articulation stricte, minimaliste, du fonctionnel et de l'esthétique est la doctrine du Bauhaus (Walter Gropius - Bauhaus - Manifest, 1918) qui mettait l'accent sur le modèle artisanal (Handwerk).
Le design des applis se laisse souvent aller à ce skeuomorphisme, souvent hérité d'une métaphore inutilement filée dans l'interface utilisateur (UI) : l'agenda en cuir, les rayons de la bibliothèque, l'enveloppe du courrier, la boîte aux lettres, etc. En revanche, les Apple Store présentent un design réussi, à l'esthétique efficace.

Attention, un jugement peut en cacher un autre se confondent : l'un technique qui concerne l'optimisation de l'ergonomie d'un design pour que la fonction s'exprime clairement dans l'esthétique, que l'art et la technique se confondent, l'autre qui relève de la sociologie du goût et de la distinction !
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lundi 16 juillet 2012

Orthographe : de la dictée au moteur de recherche, du magazine au scrabble

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Timbrés de l'orthographe, (sous-titre : A lire sans faute). Trimestriel, 100 pages, tiré à 25 000 exemplaires, 4,9 €

Les Editions de l'Opportun, éditrices de ce magazine, ont mis en place un concours national de dictée (25 000 participants déclarés, avec finale dans un amphi de la Sorbonne) ; le magazine en publie corrigés et palmarès. Institution, le concours est parrainé par La Poste, défenseur des lettres et du courrier, d'où le titre du magazine ; il a le soutien du ministère de l'éducation, du Figaro littéraire...
Les Editions de l'Opportun commercialisent une gamme de produits orthographiques dérivés (guides pratiques, jeux), dont le magazine fait la promotion. Aucune autre publicité n'y est présente.
Le contenu du magazine est en grande partie didactique : exercices à trous, dictées préparées avec les "difficultés expliquées", comme à l'école. Il s'agit d'entraîner des lecteurs aux compétitions d'orthographe. Le magazine s'intéresse aussi, de manière plus désintéressée, à la langue française et publie des rubriques sur le secret oublié des expressions, l'évolution des mots, les publications récentes sur le thème.

"Science des ânes" ? "Politesse de la langue" ? Maladie ? Car on a médicalisé la faute d'orthographe : disorthographie ! Tout Français a vécu une partie de son enfance ballotté entre 0 et 5 fautes d'orthographes. Ce souci de l'orthographe et de ses pièges le poursuit : toute sa vie, il / elle sera jugé(e) sur son orthographe (stigmate) ; tout au long de sa vie, il jugera ses collègues et ses petits chefs, ses correspondants sur l'orthographe. Orthographe dans les copies de concours et d'examens, dans les CV et dans les courriers, dans les lettres d'amour même. L'orthographe a encore cours sur le marché de l'emploi et sur le marché matrimonial (cf. la chanson de Serge Gainsbourg, "En relisant ta lettre"). L'indignation orthographique a de l'avenir : l'orthographe est un filon éditorial riche d'autant que le Web y ajoute les fautes de frappe (typos, indissociables des claviers et de leur ergonomie), les corrections intempestives des logiciels de correction orthographique / typographique et des moteurs de prédiction (T9), le mélange avec les langues proches, les abréviations qui se propagent au-delà des textos... Orthographe et scrabble aussi (cf. infra, le hors série de Timbrés de l'orthographe, décembre 2016). D'ailleurs l'orthographe est associé aux jeux (cf. Scrabble magazine).
Pourquoi l'orthographe est-elle si importante ? On peut y déceler des explications sociologiques et politiques mais aussi, avec le numérique, des raisons techniques, donc économiques.
  • Explications sociologiques et historiques
L'orthographe a une valeur symbolique, Victor Hugo n'identifie-t-il pas que le mal à une "Faute d'othographe de Dieu" (1859) ? Héritée du certificat d'études primaires (CEP, 1866-1989), la dictée a été, avec l'écriture, le premier critère de réussite pour l'éducation scolaire obligatoire. Au CEP, 5 fautes à la dictée était éliminatoire. L'orthographe était avec l'écriture (que l'on évaluait à l'occasion de la dictée) le pilier de la culture scolaire, la faible distinction de ceux qui n'ont pas fréquenté longtemps l'école. La dictée reste déterminante au Brevet des collèges (cf. La dictée.fr). Aussi, réformer l'orthographe risque de dévaluer le capital culturel de ceux qui n'ont pour tout bagage et toute fierté scolaires que de l'avoir apprise et ne l'avoir pas oubliée.
D'obsession, de crainte, l'orthographe est devenue un divertissement, la dictée un jeu, de celle plutôt mondaine de Mérimée à celle télévisée de Pivot. Timbrés de l'orthographe en est l'illustration. Dans les pays anglophones, des concours existent également, Spelling Bees. La télévision s'est emparée très tôt de la passion orthographique : le premier des game shows, diffusé en 1938 sur la BBC, était consacré aux spelling bees. "Des Chiffres et des lettres", émission lancée en France en 1965, aujourd'hui sur France 3 et TV5, a une forte présence internationale, publie une appli, des jeux de société, etc. En novembre 2012, Mondadori lance un trimestriel "Des chiffres et des lettres magazine".
  • Explications politiques
Touchant à la langue officielle et à l'enseignement, l'orthographe et ses réformes sont affaire d'Etat(s) ; elles mettent en branle l'Académie française, les institutions de la francophonie internationale, les institutions éducatives, les médias... La question de sa réforme revient régulièrement, sous la pression des administrations scolaires, mobilisant des linguistes, des sociologues : diminuer la difficulté de l'orthographe pour améliorer la réussite scolaire, pour faciliter l'apprentissage de la langue française par les étrangers ? Produit de la tradition et de la convention, résultante de nombreuses couches d'arbitraire sédimentées depuis plusieurs centaines d'années, l'orthographe est même souvent perçue comme un patrimoine à conserver (cf. l'édito du magazine).
  • Orthographe et numérique
Les médias numériques donnent une dimension nouvelle à l'orthographe car elle affecte les performances des moteurs de recherche lexicaux (10% d'erreurs d'orthographie dans les requêtes, selon Google). Par voie de conséquence, l'orthographe concerne aussi le SEO, à travers l'orthographe des sites, des requêtes, des traductions automatique, imposant à l'exploitation des données lexicales une lemmatisation vigilante (cf. Orthographe. De la dictée au moteur de recherche). Des algorithmes de détection et de correction des fautes d'orthographe sont développés (cf. nécessité d'anticiper les typos et les fautes d'orthographe, ex. Keyword Typo Generator, etc.). La question globale de l'orthographe devra sans doute être repensée dans cette perspective.


Pour aller (un peu) plus loin
L'orthographe, plaisir des yeux. Compte-rendu du livre de Bernard Cerquiglini sur L'Histoire de l'orthographe française
Conseil Supérieur de la langue française, Les rectifications de l'orthographe, 1990
Spelling correction for Search engine Queries
Nuance, T9 The Global Standard for Mobile Text Input
et un film sur les concours d'orthographe aux Etats-Unis : Spellbound, 2002 (Jeffrey Blitz)

samedi 14 juillet 2012

Humanisme numérique. Programmer pour apprendre à penser ?

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Steve Jobs: "The Lost Interview", interview donnée à la télévision publique américaine (PBS) en 1995, retrouvée et publiée en 2012, 1h12mn, diffusée en salles de cinéma aux Etats-Unis et sur iTunes (cf. copie d'écran ci-dessous), 4,99 $.

Pour la société et l'économie numériques, quelle formation ?
Steve Jobs, fondateur d'Apple, interviewé par la télévision publique américaine fut amené à donner, en passant, un avis indirect sur ce sujet. Tout d'abord sur le rôle éducatif, formateur de la programmation puis sur les "liberal arts" et le sens du goût, du beau qu'il faut inculquer.
  • Steve Jobs défend les "liberal arts" (mathématiques, sciences, langues, logique, philosophie) ; il décclare aussi l'importance du goût (taste), s'affligeant du manque de goût chez Microsoft ("Microsoft, c'est MacDonald's"). Eloge des hippies et de leur intuition humaniste, éloge des artistes. Eloge des outils. En gestion, éloge des produits d'abord, fabriqués méticuleusement , réalisés avec goût, sans lesquels la gestion et le marketing se fourvoient et finissent par couler une entreprise...
Etant donné les désastres éducatifs auxquels nos sociétés se laissent aller, dont la situation de l'économie constitue un fidèle reflet, de tels énoncés sont précieux ; ils viennent de quelqu'un qui sait de quoi il parle. Le  discours de Steve Jobs rompt aussi bien avec ceux qui réclament une formation immédiatement utile qu'avec ceux qui pensent que les arts et les lettres peuvent trouver dans la formation une place autonome loin de la production et de ses outils (programmation, mathématique, etc.).

Cette émission constitue une réflexion sur la gestion des entreprises et sur l'éducation.


mardi 10 juillet 2012

YouTube Google YouTube Google YouTube Google

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  • Selon Médiamétrie, YouTube/Google est en tête des audiences de l'Internet mobile du mois (top 20 des groupes).
  • En automne 2012, YouTube/Google lancerait 13 chaînes de télévision thématique originales gratuites (source : AFP)... Un appel d'offres pour la création a été lancé (Endemol, Capa, Aufeminin.com, etc.
  • YouTube achète des droits du football
  • Selon comScore, YouTube/Google est en tête de l'audience vidéo.
  • Avec Médiamétrie, YouTube/Google s'installe en toute légitimité dans la mesure mixte des audiences TV / Internet.
  • Les téléviseurs dans les foyers seront de plus en plus connectés au Web, et il y aura des applis GoogleTV.
Alors ?
La télévision traditionnelle ne pourra plus feindre très longtemps d'ignorer YouTube/Google. Les législateurs et les organismes de réglementation non plus.
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ONU : le "machin" et l'Internet

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"Le machin qu'on appelle l'ONU", comme l'a définitivement baptisée De Gaulle, alors Président de la République (septembre 1960), affirme que l'accès à Internet est un "Droit de l'Homme". Tant mieux. Certes, l'ONU et son Conseil des droits de l'homme n'ont aucun moyen de faire respecter ce droit justement proclamé mais cela justifiera au moins l'existence de commissions, de subventions, de colloques, de voyages, de discours... et, qui sait, cela pourrait indisposer et voire même faire hésiter telle ou telle dictature : c'est toujours ça. Encore que rien ne dérange vraiment les dictatures, surtout pas les organisations internationales.

Selon le texte du Human Rights Council, il s'agit d'aligner le droit d'accès à l'information on line sur le doit d'y accéder off line : donc, il s'agit de rappeler, tout simplement, la liberté de la presse quels qu'en soient les supports (Article XI de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ou article 19 de la Déclaration universelle). Convergence des supports, convergence des droits. Tant mieux.


A propos, le texte du Conseil omet de mentionner quels pays, actuellement, ne respectent pas le droit pour toutes et tous d'accéder au Web et à ses services ?
Mais aussi, quels pays (exemple : Grande-Bretagne), quelles entreprises complices fournissent les technologies qui les aident à bloquer, à censurer le Web, à repérer, emprisonner, voire assassiner ceux qui tentent de faire valoir leur droit à Internet ? 
D'ailleurs, est-il des Droits de l'Homme que ces pays respecteraient ? Le droit des femmes à disposer d'elles-mêmes ? Le droit d'exercer la religion de son choix, ou aucune, le droit à la santé, à l'éducation, à la sûreté, à la vie privée...
Ces pays, si peu recommandables, sont-ils membres de l'ONU, la financent-ils, y président-ils des commissions ? De facto, le "machin" couvre tout cela de sa grandiloquente impuissance. Problème logique.

dimanche 8 juillet 2012

Régime culturel sans numérique

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Couverture du magazine papier
La Une de l'hebdomadaire allemand Der Spiegel invite ses lecteurs à s'abstenir de téléphoner, à se mettre au régime sans numérique ; ainsi tel Ulysse qui s'attacha au mât de son navire pour résister aux sirènes, il faudrait ligoter le smartphone qui tente de nous charmer et l'empêcher de nuire. On avait déjà organisé en France, il y a des années, des semaines sans télévision, des journées sans Web. Ah! le plaisir de se priver du smartphone ! Heureuse abstinence, douce prohibition, d'où vient une telle idée ? 

Le smartphone est devenu un appareil indispensable. Faut-il en conclure d'une maxime paraphrasant Descartes et son cogito ? "iPhone, also bin ich" ("je me sers de l'iPhone donc je suis") ou encore, "Ich teile, also bin ich" ("je partage donc je suis"). Ne prenons pas les utilisateurs (et les lecteurs) pour des imbéciles. Ce dont témoigne l'usage du smartphone, c'est d'un changement social, d'un besoin des autres et d'une amélioration des communications. C'est aussi un outil qui remplace l'agenda papier, le stylo et le carnet pour prendre des notes, la montre, le plan de la ville, le plan du métro ou des lignes de bus, un appareil photo, une lampe électrique, une calculette, un dictionnaire... Nulle pathologie ne s'en suit nécessairement.

A Boston, une pithie qui a un bon service de presse, s'autorise d'une position universitaire pour délivrer ses oracles, réponses à des questions qu'on ne lui a pas posées, et qu'interprètent, nouveaux prophètes, des journalistes. Que dit notre pithie ? Que nous sommes malades du smartphone, que le numérique dérobe nos loisirs, limite les relations directes, face à face, que tout cela engendre la solitude, le repli sur soi (bien que nous ayons aussi "perdu la capacité d'être seuls avec nous-même"), que nous perdons notre capacité d'attention, que nous sommes fascinés... Ainsi s'énonce le syndrome psychopathologique de la vie numérique : cette médicalisation systématique, où un historien voit le "dépotoir de l'insoluble", trouve dans la relation aux technologies un terrain d'expansion infini. 

Que fait la presse dans cette galère ? Ne s'efforce-t-elle pas de convertir ses lecteurs au numérique ? Pourquoi les journalistes ne mettent-ils pas en cause les affirmations des pseudo-experts au lieu de leur servir la soupe ? Est-ce le sujet le plus important de ces temps de crise pour lui consacrer un dossier de 12 pages ? Pourquoi la communication numérique et pas l'automobile, "the mechanical bride" ?

Der Spiegel sur iPad, sur iPhone, sur le Web... (copie d'écran)

vendredi 6 juillet 2012

Le satellite de télévision a 50 ans


Il y a cinquante ans, le 10 juillet 1962, Telstar, ouvrait une voie royale pour la télévision. Cette innovation, quinze à vingt ans plus tard, déclenchera aux Etats-Unis l'éclosion des premières chaînes thématiques et payantes : CNN, HBO, ESPN, Nickelodeon... et le développement du câble.

Avec son nom aux multiples connotations, et, comme le fameux signal de Spoutnik cinq ans auparavant, Telstar invitait à la rêverie. En témoigne la bande-son de la société des années 1960. "Cette année là", Telstar était dans l'air du temps.

Le satellite est d'abord inséparable du son des Tornados, groupe anglais emblématique, dont la musique sera reprise, "citée" à la fin du 10e épisode de Mad Men, décidément subtile et précis dans ses allusions historiques.

Les paroles françaises d'une chanson de Jacques Plante écrites sur cette musique, chanson interprétée par Colette Déréal et par Les Compagnons de la Chanson, exploitent ce potentiel de rêveries : "Tout là-haut plus haut que les oiseaux", "une étoile d'amour" : on est loin de la course militaire à l'espace...




A la même époque, un groupe suédois, The Spotnicks, se produit en combinaison spatiale pour costume de scène, comme Youri Gagarine. Surgissement de la modernité. L'imaginaire du satellite a pris des directions opposées, le compagnon de route stellaire, le paradis sur Terre et Star Wars... "La valeur d'une image se mesure à l'étendue de son auréole imaginaire" (G. Bachelard, L'air et les songes).
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jeudi 5 juillet 2012

Presse gratuite : la Une est en Trois

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Avec la presse gratuite dite d'information, il arrive que la publicité prenne la première place. Ainsi, aujourd'hui, mercredi, sur Direct Matin, le discours de politique générale tenu par le Premier ministre à l'Assemblée nationale est rejeté en page 3, après les soldes de CDiscount. 20 minutes confie sa une et sa deux à un film, "The Amazing Spider-Man".
Sur A nous Paris, la Une et la page 2 sont vendues à Heineken (avec un slogan en anglais).

Normal : le modèle économique de cette presse impose une telle mise en page. Les gratuits vendent leur "lectorat" à des marques, à des annonceurs. La pub paie tout, le lecteur rien.
La Une avec la Deux sont devenues des emplacements publicitaires préférentiels. En cela, la presse gratuite ne fait que suivre les autres médias gratuits : à la télévision comme à la radio gratuites, la publicité précède l'information.
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lundi 2 juillet 2012

Smash is a smash

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La série "Smash" ira en seconde saison ; elle est sauvée in extremis par l'audience différée, titre le New York Times.  "Double entendre", comme on dit en anglais ! On pourrait aussi noter que Smash aurait pu être sortie de la gille de rentrée faute d'une mesure d'audience adéquate et complète. Car enfin, si la série est trop peu regardée en direct pour franchir le seuil d'acceptabilité, son audience s'accumule bien au-delà du direct, tout au long de la semaine, pour réunir une audience totale satisfaisant les annonceurs.

Diffusée le lundi soir à 22H par NBC, la série avait d'abord déçu ceux qui, pressés, lisent l'avenir des émissions dans le marc de café des audiences mal évaluées. Lancée par "The Voice" comme lead-in elle fut aussi victime des passages à vide de cette émission en direct (fin avril, "The Voice" baisse de 8%, "Smash" baisse de 10%). L'effet d'entraînement a peu joué.
En revanche, si l'on prend en compte l'audience différée, celle des émissions enregistrées sur un DVR, par exemple, la situation s'avère moins alarmante.
D'abord parce que le taux d'audience final, une semaine après diffusion (7 jours, live+7), est plus élevé que celui du soir même. Mais aussi parce que l'audience différée est une audience fidèle, qui manifeste pour cette série un taux d'intérêt élevé : elle ne veut pas manquer son émission.
Reste la question de la publicité, plus facile à éviter en différé qu'en diffusion directe (admettons !). Faute de certitudes, un annonceur et son agence auront toujours intérêt à déclarer que l'audience différée est moins intéressante que l'audience en direct (live). Nième postulat de la géométrie télévisuelle. Et, pour l'annonceur, c'est toujours mieux de profiter de l'audience mesurée gratuitement : GRP bonus, comme l'audience hors du domicile ! Voilà un avantage qui n'a pas besoin d'être démontré.

Ce "cas" souligne combien, alors que la consommation de télévision se complexifie et se disperse, le marché publicitaire de la télévision dépend de plus en plus de ses analytics, et qu'il vaut mieux les rendre plus robustes que les ébranler en les éparpillant.
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dimanche 1 juillet 2012

La bande-son de nos sociétés

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4,9 €, 6 numéros par an pour 25 €, 100 pages. Bimestriel nouveau (voici le numéro 2) consacré à la musique, aux musiques. Beaucoup de musiques : rock, bossa nova, jazz manouche, Norah Jones, raï, Cuba, Yvette Horner...
La publicité, encore rare dans les premiers numéros, est consacrée à la musique, et à ses manifestations commerciales : radio, DVD, concerts, albums, festivals...

Le sous-titre de ce magazine est une formidable promesse : la musique comme bande-son de nos vies, de nos sociétés.
Puisque la musique est partout, dans les supermarchés et les ascenseurs, musique pour ambiance commerciale (Muzak), dans les films et les séries TV, dans les jeux vidéo, dans les restaurants... Musique enregistrée, morte, achevée et mise en boîte, vendue au mètre, assénée par les véhicules qui passent dans les rues, par les voisins, musique dans les avions, musique chez le coiffeur, chez le dentiste, musique en attendant... Sonneries de téléphone, répondeurs, jingle... Airs classiques et populaires squattés par les pubs, à la radio, à la télé, sur le Web. Soundscape.
Nous habitons le monde en consommateurs de musique. Notre "civilisation" semble avoir horreur du silence ; elle a besoin de meubler, de remplir à ras bord son environnement sonore. Musique entendue, consommée plutôt que jouée et pratiquée. Musique proclamée à coup de hauts-parleurs, comme une identité : hymnes de classes, de générations, de "communautés"... A quand le droit au silence dans les doits (et les devoirs) de l'Homme ? "Qu'est ce que cela peut te faire / On ne choisit pas son enfer" (Aragon).

Il faut encore beaucoup de travail pour tenir les promesses du sous-titre. Déjà, on perçoit des possibilités, des ébauches : brèves sur les émophobes en Irak (p.10), sur le coup de gueule d'un batteur contre le patron de Spotify (p. 11), sur Céline Dion et la musique d'enterrement (p. 11)... Bel article sur la bande-son de l'histoire d'un demi-siècle d'Algérie : assassinat des musiciens populaires et terrorisme, printemps berbère et chanson kabyle (Lounès Matoub, assassiné en 1998 : sa musique dérange), le raï des années 1980 (Cheb Mami, Khaled), le rap récent, la musique de la jeunesse algérienne... Article bien trop rapide (manque aussi un CD ou un fichier à télécharger) sur un sujet méconnu, difficile alors que sur "les papys du rock", on sait presque toutet d'ailleurs, on ne veut peut-être rien savoir. Un article sur Hadopi, et beaucoup d'articles sur des aspects inattendus, inconnus de la musique dans nos sociétés (les "crate diggers", les "suicide girls", etc.).
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