mercredi 30 octobre 2013

Aereo TV et l'avenir du modèle économique de la TV américaine


Depuis plus d'un an maintenant, un spectre hante la télévision américaine : Aereo.
Source : Aereo
Aereo (IAC) permet la réception de la télévision locale terrestre, celle des stations du DMA où l'on se trouve, sur un support numérique quelconque : tablette, smartphone, ordinateur. Pour cela, Aereo installe des petites antennes qui captent les programmes que diffusent (brodcast) les stations locales et les retransmettent via Internet.
Pour le consommateur, pas de câble, pas d'équipement de réception spécifique, mobilité assurée simplement. Pour 80 $ par an (8 $ par mois), le consommateur peut accéder aux antennes Aereo et regarder une vingtaine de stations, tous les networks. De plus, Aereo offre l'enregistrement, donc le différé, sans appareil (cloud DVR). Pour Aereo, il reste un problème technologique : des coûts de retransmission élevés (électricité pour alimenter les antennes) qui pourraient menacer l'équilibre économique de l'opération.
Aereo étend son offre, DMA après DMA, en partant de la côte Est des Etats-Unis. 7 DMA couverts aujourd'hui, 22 DMA prévus pour la fin 2013 (mais Chicago sera en retard).
Aereo, surtout s'il est couplé à une offre OTT (Netflix, Hulu, Apple TV, etc.) peut dispenser de l'abonnement à un agrégateur (bundling) et inciter au désabonnement (cord-cutting).
  • Les groupes de stations (Sinclair, Hearst, etc.) et les networks mènent une bataille juridique constante devant les tribunaux pour que Aereo cesse ses retransmissions, en vain jusqu'à présent. Les plaignants ont maintenant saisi la Cour Suprême (SCOTUS). Le prétexte mis en avant est l'infraction au droit d'auteur (copyright infringement). Ils ont été rejoints en novembre 2013 par des ligues sportives, baseball (MLB) et football (NFL).
  • Les grands opérateurs du câble (MSO) et du satellite s'intéressent de près au modèle Aereo. En effet, s'ils adoptaient un modèle du même type, ils n'auraient à payer des droits de retransmission aux stations (donc aux networks) qu'ils retransmettent ; or, le montant total des droits de retransmission payés par les opérateurs du câble et du satellite s'élèvera, en 2014, à plus de 6 milliards de dollars.
  • De leur côté, des networks auraient envisagé, en mesure de rétorsion, de ne plus diffuser leurs programmes par voie terrestre (donc sans passer par des stations affiliées ou leur appartenant) et de revendre leurs fréquences.
  • Notons encore que, en 2013, CBS a pris une participation dans Syncbak, une entreprise qui travaille à un modèle homologue à celui de Aereo et permettant la diffusion de la télévision locale sur des supports numériques mobiles. Deux associations interprofessionnelles, la NAB (National Association of Broadcasters) et la CEA (Consumer Electronics Association), sont également actionnaires de Syncbak. Syncbak est testé par une centaine de stations.
L'enjeu de la bataille est donc d'importance puisque c'est tout le modèle économique de la télévision commerciale américaine qui est en question. Sarah Laskow, dans Columbia Journalism Review du 30 octobre fait justement remarquer que, si la presse économique a titré sur le sujet, sur Twitter, on n'y a pourtant accordé aucune visibilité (cf. "SCOTUS could change how you watch TV"). Limite des réseaux sociaux en matière d'information quand seul le lecteur décide des sujets à couvrir.
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